Après le succès de Céphale et Procris (Elisabeth Jacquet de la Guerre) récompensé d’un diapason d’or, et Te Deum - histoire de la femme adultère (Nicolas Clérambault) l’ensemble a nocte temporis, retrouve le Label Château de Versailles Spectacles, en coproduction avec le Centre de musique baroque de Versailles, pour un nouvel album envoûtant, dédié à Rameau et Iso.

Alors que Pygmalion, œuvre emblématique de Rameau, dévoile la passion du sculpteur épris de sa création, Zémide de Pierre Iso révèle la douce tyrannie de l'Amour, tissant une allégorie où les cœurs, même les plus farouches, cèdent à son pouvoir. Telle Galatée s'éveillant sous le regard de Pygmalion, ce programme empreint de passion baroque prend vie sous la direction inspirée de Reinoud Van Mechelen, offrant un spectacle où musique et sentiments s’entrelacent dans d’éclatantes symphonies.

Regrouper deux opéras en un acte s’inscrit dans une pratique bien ancrée au XVIII^e siècle en France, où l’Opéra de Paris assemble dès la fin du règne de Louis XIV des spectacles à partir d’extraits d’œuvres populaires. Appelées « fragments », ces soirées mêlent dans leur programme, en forme de « Medley », des actes isolés sans lien narratif, tirés de ballets ou d’opéras de compositeurs variés. Ces montages offrent une variété de ton et de style, entre pastorale, comédie et drame, et rencontrent un large succès. Des compositeurs comme Rameau, Campra ou Mouret y sont largement représentés.

Cette tendance stimulera la création d’opéras en un acte, un format propice à l’expérimentation.

Rameau y excelle comme avec Pygmalion (1748). Centrée sur l’artiste amoureux de sa statue, l’œuvre s’impose par son originalité : intrigue concise, place importante offerte à la danse, virtuosité vocale et chorégraphique. A sa création, l’œuvre met notamment en lumière la danseuse Mlle Puvignée, acclamée pour son rôle de la Statue, qui marquera durablement le public. Repris à de nombreuses reprises jusqu’en 1781, Pygmalion demeure l’un des opéras les plus joués de Rameau.

En écho à cette tradition de fragments, Zémide de Pierre Iso, présenté en 1759, offre un contrepoint méconnu mais remarquable. Ce compositeur discret livre ici une œuvre raffinée, dans la lignée de Rameau, mêlant monologues expressifs, airs mélodiques et chœurs au contrepoint soigné. Le livret, célébrant l’Amour, offre une grande liberté dramatique et musicale. Malgré une distribution prestigieuse et des qualités indéniables, Zémide ne connaît qu’un succès limité, sans doute en raison d’un style jugé conservateur dans un contexte en mutation. Reinoud Van Mechelen, a temporis et le chœur de Chambre de Namur, lui rendent ici ses titres de noblesse.