Cum invocarem
Nicolas Bernier fait partie des grands compositeurs français à la charnière des 17e et 18e siècles. Né en 1665 à Mantes-sur-Seine (aujourd’hui Mantes-la-Jolie), il fut probablement formé dans la collégiale de la ville ainsi qu’à la cathédrale d’Evreux. Il aurait également fait le voyage de Rome pour étudier auprès d’Antonio Caldara. Sa présence à Paris est attestée dès 1692 où il exerce comme maître de clavecin. Pour son premier poste officiel, il est nommé à la maîtrise de la cathédrale de Chartres en 1694, qu’il quittera 4 ans plus tard pour Saint-Germainl’Auxerrois à Paris, en face du château du Louvre. En 1704, il démissionne pour succéder à Marc-Antoine Charpentier à la Sainte- Chapelle de Paris. Il fréquente par ailleurs le cercle de l’Abbé Mathieu, curé de Saint-André-des-Arts qui rassemble en sa paroisse les ultramontins, celui de Philippe d’Orléans, futur régent et mécène des arts dont il est également maître de musique, et enfin celui de la duchesse du Maine, pour qui il compose notamment les Nuits de Sceaux. En 1712, il épouse Marie Catherine Marais, fille du compositeur Marin Marais. Enfin, à 58 ans il est nommé sous-maître de la Chapelle Royale deVersailles, aux côtés de Lalande, Gervais et Campra. Tout au long de sa carrière, il a bénéficié de la protection de nombreuses personnalités dont il a su, par son talent, s’attirer les grâces. Il s’éteint à Paris en juillet 1734 à l’age de 69 ans.
Jean Serré de Rieux fait de cet ardent défenseur du style italien l’apôtre des « goûts réunis » dans Les Dons des Enfants de Latone : « La France admire en lui l’Italique science ; /Rome revere en lui l’ornement de la France ». Il est également unanimement reconnu pour ses dons d’écriture et notamment pour la fugue. Ses petits motets furent joués à Saint-Cyr comme en Nouvelle-France. Ce fut enfin un excellent pédagogue, qui écrivit un remarquable traité de composition.
Le grand motet Cum invocarem de Nicolas Bernier est l’un des rares à nous être parvenu dans son intégralité, avec les parties intermédiaires de l’orchestre (hautes-contre, tailles et quintes de violon). Il provient de la collection de l’Académie des Beaux-Arts de Lyon dont une grande partie est conservée aujourd’hui à la bibliothèque municipale de cette ville. Il nécessite un effectif typiquement français à cinq parties, avec 6 solistes ou petit choeur, le choeur à 5 parties et l’orchestre, comme le Lauda Jerusalem d’Henry Desmarest, contemporain.